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Les aventures de Djoni, baroudeur de l'espace (4)

(Note aux éventuels nouveaux lecteurs : pour comprendre quelque chose à ce qui suit, il est recommandé de commencer par le premier épisode).


Il faut (pour 4)
côtelettes, 8.
Beurre, 50g.
Oignon, 1 petit.
Carotte, 1 petite.
Ail, 1 gousse.
Baies de genièvre, 10.
Concentré de tomates, 1 cuillerée à café.
Farine, 1 cuillerée à soupe rase.
Vinaigre, 6 cuillerées à soupe.
Vin rouge, 2 verres.
Bouquet garni (persil, thym, laurier), poivre, sel.


épisode faure


    Il fallait bien reconnaître qu'il y avait un problème.
    Même l'optimisme inaltérable de Djoni sentait confusément que là, c'était pas le moment.
    C'était une sensation peu habituelle pour Djoni, mais une once d'inquiétude vint à traverser, circonspecte et timide, son esprit qui d'habitude, prenait les rats et les serpents pour de braves bestioles, les escrocs et meurtriers pour des pauvres types à l'enfance maltraitée, et Pluton pour un possible havre de paix si on voulait bien lui laisser une chance.
    Mais, non, décidément, des gardes impériaux qui entourent votre propre vaisseau, ça a toujours un je-ne-sais-quoi de préoccupant, que même un positiviste tel que Djoni était à même de ressentir.
    Surtout quand l'un deux s'écriait :
    «Hep ! Vous, là-bas !»

    Au même moment, à des milliards de kilomètre de là, dans son bureau privé, lové au fin-fond des plus reculées des profondeurs du palais impérial, l'infâme Zorg réfléchissait.
    Enfin, quand je dis : «au même moment», bon, heu, évidemment, je ne sais pas si en terme scientifique ça a vraiment un sens, vous savez ce que c'est, l'espace-temps, la relativité et tout le bazar, on ne sait plus ce que «quand» et «où» veulent dire. Bon, on va dire que ça revient, concrètement parlant, à être au même moment. De toute façon, je vais pas vous expliquer les complexités structurelles de la trame temporelle de l'Univers, et d'une parce que j'en suis incapable, et de deux parce que je fais ce que je veux, et de trois parce que sinon ça n'a pas d'intérêt d'écrire de la science-fiction si c'est que pour tout soit conforme à la réalité, autant faire du Julie Lescaut.

    Quoique.
    Ouais bon bref.

    Zorg, car enfin, c'était bien lui, réfléchissait.
    C'était son activité favorite, à Zorg.
    C'était sans doute la raison pour laquelle il était totalement chauve : l'activité cérébrale à haute dose a un effet désherbant chez certaines personnes. Nul n'était capable (et nul n'aurait osé, de toute façon) d'imaginer Zorg autrement que chauve ; c'était tout bonnement inconcevable, comme d'essayer d'imaginer Pluton verdoyante et chaleureuse, voyez.
    Mais, il semblait que sur Zorg, l'activité capillaire se soit étrangement concentrée sur ses sourcils : en effet, Zorg avait des sourcils impressionnants, et ne vous moquez pas je vous prie, car quand je dis impressionnant, c'est impressionnant.
    Zorg était du genre impassible : un sourire, chez lui, c'était un frémissement infime de la commissure plus ou moins vers le haut et toujours d'un seul côté (le gauche) ; une colère, c'était un déplacement lent, très lent, trop lent, de la tête, qui déplaçait ainsi le faisceau du phare de haine pure émanant de son regard, droit vers le fautif, qui sentait alors darder sur lui deux lasers directement rivé sur ses yeux, ce qui était assez stressant ; et une satisfaction, c'était... Non en fait, Zorg n'avait pas de mimique pour exprimer la satisfaction.
    Et le coup du phare haineux, c'était justement en grande partie grâce aux sourcils ; des fois les gros sourcils, c'est rigolo, mais là vraiment ça foutaient les chocottes.
    Cela dit, en y réfléchissant, je me demande si les cernes monstrueuses, de couleur indéterminée, entre un lie-de-vin glauque et un verdâtre du meilleur effet, ne jouaient pas un peu. C'est possible. Mais enfin, quand même, hein, les sourcils, brrr.
    En plus, il était grand, mais alors là, grand.
    Grand, vous voyez ? Hé bien, plus.
    Et il avait le chic pour toiser. Haaa, c'était un toiseur de premier ordre. Ça, pour toiser, il toisait. Même un extra-terrestre plus grand que lui, il arrivait à le toiser. C'était très désagréable. Surtout que c'est très mystérieux, le toisage, quand on y pense à deux fois. Il ne suffit pas de regarder de haut en bas, comme ça. Il y a un truc, pour le toisage, il faut arriver à dégager l'impression de toiser, avec juste ce qu'il faut de mépris calculateur, et alors là, Zorg était imbattable. En plus, le costume sobre et noir dont il était éternellement vécu était parfait pour la technique du toisage.

    Mais, là, cette fois Zorg ne toisait personne, sinon la situation.
    Pour tout dire, l'Empereur commençait à les lui briser menu menu.
    L'Empereur ne jurait que par la communication, les sourires éclatants et les brushings ondulés. C'était d'abord un showman de premier ordre. Avec une énergie sexuelle envahissante.
    L'ennui, c'est que pendant ce temps-là, vous comprenez, il y avait les affaires courantes à régler, l'espionnage à gérer, les meurtres à commanditer, les tortures à superviser, l'asservissement à réglementer, l'exploitation des peuples à planifier, bref, le quotidien routinier d'un Empire.
    Or, par les temps qui couraient, la situation se corsait, en grande partie à cause de ces satanés rebelles qui faisaient rien qu'à embêter Zorg.
    Car, il faut savoir que Zorg n'aurait, au fond, rien souhaité de mieux que de passer ses journées à peindre des aquarelles et à aller à la pêche : malheureusement, les hasards de l'administration et ses qualités inégalables de terrifiant gestionnaire l'avait propulsé éminence grise (d'un gris très foncé) de l'Empereur. Donc, il fallait bien qu'il s'occupe de tous ces zozos qui ne semblaient avoir d'autres buts dans la vie que de lui causer des soucis et de charger ces cernes de coloris toujours plus exotiques. Décourageant.
    Et là, en ce moment, la princesse Lycra commençait à lui taper sérieusement sur le système. Et puis, l'autre, là, ce Stewd, dont on savait rien sinon que ça papotait dans les milieux rebelles. C'était agaçant, ça, de pas savoir, Zorg en était fatigué à l'avance : il allait encore falloir en engueuler, des incapables, pour faire avancer l'affaire et dégotter des informations. Décourageant.
    Et en premier lieu, convaincre cet imbécile d'Empereur qu'il y avait plus important que son harem et ces débauches orgiaques continuelles qui faisait ressembler le palais impérial à un lupanar géant. Zorg se dit qu'il faudrait bien se résoudre à les lui couper un jour, à l'Empereur. C'était devenu effrayant. Depuis qu'on avait retrouvé le chien de l'Empereur (un dogue allemand, tout de même) geignant misérablement, terré dans un recoin reculé des caves du palais, les pires rumeurs couraient sur son énergie sexuelle insatiable.
    Et lui, Zorg, il fallait qu'il s'occupe de la marche de l'Empire muni d'un zouave priapique pareil. Dé-cou-ra-geant.
    Zorg pris soudainement un cachou.
    Car il adorait les cachous, il pouvait en avoir un besoin irrépressible dans les moments les plus saugrenus : ça lui prenait comme une envie de toiser.


    Hildegonde apparut soudain sur le seuil du vaisseau, en haut de la rampe d'accès, munie d'un blaster pratiquement plus grand qu'elle : et sans sommation, elle tira dans le tas des gardes impériaux, en criant :
    «Bougez-vous les miches !!!»
    Une demi-seconde plus tard, un bras poilu se détendit comme un ressort, zboïng, et le malheureux garde posté sur sa trajectoire effectua un vol plané fort réussi, un bon 8,5/10 au moins.
    Alors que sa sœur canardait comme une démente les pauvres gardes qui ne comprenaient pas bien ce qui leur arrivait, Djoni essaya vainement au milieu du raffut quelque chose comme :
    «Non, voyons, je vous en prie, ne le prenez pas mal, restons courtois, je suis sûr que c'est pour plaisant...»
    Mais Klinty le pris par le peau du cou, et le traîna de force dans le vaisseau d'une poigne de fer au travers des tirs de blaster. Djoni eut vaguement l'impression, dans le tumulte, de voir l'arme d'un des gardes voler toute seule dans les airs, juste après que la main libre de Klinty eût effectué une sorte de signe, mais il se dit qu'il avait été le jouet de son imagination.
    Hildegonde hurla derechef :
    «Sam, ramène-toi !! Met en route les rétro-réacteurs, active la propulsion photonique, lance les déflecteurs à double-rayon, déclenche les volets de régulation de poussée, découple les inverseurs à triple activation bosonique, DÉPÊCHE-TOI !!!»
    Du fond de son hamac, dans la salle des machines, Sam ouvrit un œil, se mit debout, dit : «voilà, voilà, j'arrive», se gratta le testicule droit tout en se dirigeant nonchalamment vers un bout de l'amas de ferraille que constituait les machines, donna un grand coup de pied dans ledit amas, puis retourna tranquillement à son hamac, en criant :
    «C'est fait !!!»
    Djoni se retrouva installé à son poste de pilotage sans bien s'en être rendu compte, et se sentit plaqué sur son siège quand Hildegonde lança la propulsion du vaisseau, celui-ci se soulevant alors dans des hurlements délirants de réacteurs (le Sigma Fox Shippyards Alpha-Class Shuttle Millenium Air Wing Falcon Omega III était comme l'antique deux-chevaux, il faisait beaucoup de bruit pour faire croire qu'il allait très vite), haut dans le ciel gris et plombé de Kachtajoy, en route vers le grand infini de l'espace.
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M
"lion ascendant poisson, l'alliance entre l'eau et le feu, équilibre absolu, richesse des complémentaires (le premier qui me parle de vapeur je lui pète la gueule)"<br /> tiens, tiens, me disais aussi.<br /> envoie moi date+heure+lieu naissance, que j'aie un pétage de gueule en règle?<br /> <br /> Bon sinon je lèche rien (eeerkkk), j'essaie juste qu'on m'aime un peu alors je réponds à la demande enfin à celle dont je suppose l'existence, ça me pourrit la vie, quoi.Donc pour ma santé mentale, ton altesse, tu constateras aisément qu'elle est dans les chaussettes.<br /> Comme les chevilles, damned.<br /> <br /> <br />
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A
Ardalia : désolée, je ne suis pas très viande :-) et il faudrait se lever tôt pour me faire bouffer du chevreuil. Zorg et Jafar, bonne association !
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A
M'enfin Anna, une côtelette!! une virgule d'os autour d'un soupir de viande! Il en faut bien deux par personnes!;o)Djac, je trouve à Zorg un petit air de méchant euh Jafar (?) dans Aladdin... mais je sais plus s'il est cale-vicieux aussi, celui-là??Une nana m'a toisée de très haut, il y  peu, mais elle lui arrivait grave pas à la cheville, au lieu d'avoir la trouille, j'étais ravie par la sottise si bien affichée... En fait, c'est moi qui suis méchante!;o)
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R
alors on rajoutera un chapitre : blogogourmant chez Françoise<br /> <br /> ça va être compliqué comme compil' ;-p
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D
>graindesel : haaa, voilà, graindesel se rebiffe, je préfère ça !!! ;o)<br /> <br /> >Mebahel : ouais attention hein, j'aime pas trop le lèche-botte par trop appuyé, non plus. C'est comme l'alcool : un peu, comme ça, de temps en temps, pour se faire plaisir, par pure gourmandise, mais l'abus de lèche-botte nuit à la santé mentale.<br /> <br /> >rififi : il s'agit des côtelettes de chevreuil au genièvre, recette tirée des «recette facile de Françoise Bernard», ma bible, offert par ma maman.<br /> <br /> >Christophe : non, Zorg est BEAUCOUP plus sympathique.<br /> <br /> >arbobo : lion ascendant poisson, l'alliance entre l'eau et le feu, équilibre absolu, richesse des complémentaires (le premier qui me parle de vapeur je lui pète la gueule) :o)<br /> <br /> >Anna : j'ai une confiance aveugle et inaliénable en Françoise Bernard.
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